Manifeste pour un modèle d’agriculture durable, résiliente et souveraine
Le Souss Massa porte le projet de transformation de l’agriculture au Maroc
AGRICULTURE
Rédaction Atlas Original
11/28/20258 min read
Dans un contexte de réchauffement climatique accéléré, de raréfaction des ressources hydriques, et de crise alimentaire mondiale, la Région Souss Massa se trouve face à un défi inédit : se réinventer pour continuer à jouer son rôle de grenier du Maroc et de premier contributeur aux exportations agricoles du Royaume.
Le modèle agricole intensif qui a fait la prospérité de la région arrive à bout de souffle : les nappes phréatiques sont épuisées, les années de sécheresse s’enchaînent, et la pression sur les écosystèmes est devenue insoutenable.
Pourtant, cette région reste le cœur battant de l’agriculture exportatrice marocaine, représentant à elle seule plus de 90 % des exportations nationales de fruits et légumes.
Les limites d’un modèle agricole à bout de souffle


Renoncer ou se réinventer ? Entrée en jeu du Complexe Horticole, relevant de l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II
C’est dans ce contexte et dans le cadre d’une stratégie régionale ambitieuse que le Complexe Horticole, relevant de l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, s’affirme comme le pilier opérationnel d’une mutation agricole indispensable. Au cœur du dispositif porté par la Société de Développement Régional pour l’Innovation Agricole (SDRIA), il incarne le volet scientifique, technique et humain de cette transformation.








La vulnérabilité actuelle du modèle agricole régional résulte d’une accumulation de choix intensifs qui ont permis, un temps, une forte croissance économique, mais au prix d’une pression démesurée sur les ressources naturelles, notamment l’eau. Ce modèle, s’il a généré prospérité et emploi, atteint aujourd’hui un point de rupture qui menace à la fois la durabilité de la production et la sécurité alimentaire nationale.
Un diagnostic sans appel : un modèle agricole à bout de souffle




Entretien avec M. Farid Lekjâa, Directeur du Complexe Horticole d’Agadir (CHA) et Directeur Général de la SDR Innovation Agricole
« Pour une agriculture durable : nous portons un modèle qui allie technologie de rupture et souveraineté alimentaire »
« 90% des exportations nationales de fruits et légumes viennent du Souss Massa, une région sous stress hydrique permanent »
Le modèle agricole que nous portons au sein du Complexe Horticole d’Agadir (CHA), rattaché à l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II (IAV), est une réponse directe aux défis structurels du Souss Massa. Notre région, moteur agricole du pays, fournit plus de 90% des exportations nationales de fruits et légumes. Pourtant, nous faisons face à une pénurie chronique d’eau, à des nappes phréatiques surexploitées, et à une succession d’années de sécheresse dues au changement climatique. Face à ce paradoxe, il nous fallait réinventer un modèle de production agricole capable de répondre aux impératifs de durabilité, sécurité alimentaire et rentabilité économique, tout en s’adaptant à une réalité climatique désormais irréversible. Ce projet est né de cette urgence d’agir, avec une approche technologique, rationnelle et tournée vers l’innovation.
Compte tenu du contexte actuel, comment est née l’idée de ce hub d’innovation agricole ?
« Ce projet est le fruit d’une collaboration entre experts marocains et néerlandais, et s’appuie sur les technologies agricoles les plus avancées pour inventer l’agriculture de demain. »
« Produire 1000 tonnes de tomates par hectare avec seulement 5 litres d’eau par kilo : un modèle révolutionnaire »
Notre région n’a plus le choix : l’agriculture actuelle, très consommatrice d’eau, est à bout de souffle. Nous devons absolument sécuriser notre production alimentaire et préserver les emplois qui en dépendent. Notre réponse est structurée autour de deux piliers majeurs : la technologie de production sous serre à climat contrôlé et la gestion rationnelle de l’eau.
Par exemple, la culture de la tomate sous serre ouverte nécessite aujourd’hui entre 70 à 100 litres d’eau pour produire un kilogramme. Avec notre technologie sous serre en verre, à climat contrôlé et en circuit fermé, cette consommation tombe à seulement 5 litres par kilo. Et ce, tout en atteignant des rendements records de 1000 tonnes/ha contre une moyenne nationale de 140 tonnes/ha dans les meilleures serres canariennes.
De plus, 100% de la production sera conforme aux normes d’exportation avec un écart de triage inférieur à 0,5%. Autrement dit, plus de rendement, plus de qualité, et moins d’eau consommée.
Quels sont les facteurs qui expliquent la mise en place de ce modèle innovant ?
Grâce à un système de culture hors-sol en circuit fermé, intégrant la filtration et la stérilisation UV de l’eau, nous garantissons une réutilisation complète de la ressource hydrique.





« Multiplier par 10 les rendements et doubler la valeur ajoutée : un levier de souveraineté alimentaire »
L’ambition est de multiplier par 10 les rendements agricoles actuels tout en divisant par 20 la consommation d’eau, grâce à :
Des serres intelligentes équipées de capteurs, sondes, et systèmes de contrôle en temps réel, permettant une gestion précise de la température, de l’humidité et des besoins hydriques.
Un pilotage numérique optimisé, garantissant une production qualitative et continue toute l’année.
Une approche sans pesticides, en conformité avec les exigences des marchés internationaux, renforçant la sécurité sanitaire.
Notre approche intègre également un programme de formation intensif pour les ingénieurs et techniciens, capables de piloter ces unités sophistiquées. À terme, nous visons la création d’un pôle d’excellence agricole au service de la souveraineté alimentaire marocaine.
Quels sont les objectifs chiffrés et les impacts attendus ?
Nous intégrons également un système d’injection de CO₂ pour stimuler la photosynthèse et augmenter significativement les rendements.
« Multiplier par 10 les rendements et doubler la valeur ajoutée : un levier de souveraineté alimentaire »
La Société de Développement Régional (SDR) Innovation Agricole est l’organe de gouvernance idoine pour porter le projet. C’est elle qui assure l’opérationnalisation du hub international, notamment via :
La mobilisation de financements innovants, avec des subventions ciblées pour accélérer la transition.
Le lancement d’études sur la réutilisation des eaux usées à des fins agricoles, afin de renforcer la résilience hydrique.
La mise en place d’une démarche collective pour associer progressivement les agriculteurs traditionnels à cette nouvelle vision.
L’objectif est que, une fois les technologies maîtrisées par les agriculteurs, ces derniers s’approprient ce modèle, grâce à un appui structuré et des formations dédiées.
Quel est le rôle de la SDR Innovation Agricole dans ce dispositif ?


« Un complexe intégré : recherche, formation, production, énergie solaire et création variétale »


Nous intégrons également un système d’injection de CO₂ pour stimuler la photosynthèse et augmenter significativement les rendements.
Notre ambition est de créer un véritable hub international d’innovation agricole, structuré autour de plusieurs pôles :
Une académie de formation dédiée aux ingénieurs, techniciens et exploitants agricoles.
Le déploiement de plus de 20 hectares de serres high-tech, avec une unité de conditionnement et d’emballage, pour une production annuelle et continue au sein même du Hub.
La mise en place d’une centrale solaire pour assurer une autonomie énergétique, en ligne avec les objectifs nationaux de décarbonation.
Un laboratoire d’analyse-conseil qui proposera ses services à prix abordables, pour aider les agriculteurs à optimiser les process de fertilisation et les pratiques culturales.
Un pôle de création variétale maroco-marocaine, avec 50 nouvelles variétés résistantes et adaptées aux conditions arides, développées via des partenariats avec des startups et universités internationales.
Lancement du Salon international Aqua-Green Tech Morocco, événement dédié aux innovations en irrigation et gestion de l’eau, qui viendra consolider ce rôle de hub régional.
Quelles sont les composantes majeures de ce projet intégré ?
« Un modèle reproductible à l’échelle nationale pour répondre à la crise hydrique et alimentaire »
Nous avons l’objectif de former 50 docteurs en sciences agricoles d’ici 2033, en partenariat avec les universités et instituts marocains et étrangers.
Ce modèle, pensé pour le Souss Massa, est exportable vers d’autres régions du Maroc et vers toutes les zones arides du monde confrontées aux mêmes défis : stress hydrique, changement climatique, nécessité de sécuriser l’approvisionnement alimentaire.
C’est un véritable tournant pour l’agriculture marocaine, qui ouvre une voie vers :
Une réduction significative de la consommation d’eau.
Des rendements démultipliés, assurant la viabilité économique.
La création d’emplois qualifiés permanents pour les jeunes.
Une souveraineté alimentaire renforcée, face aux tensions internationales.
En quoi ce modèle peut-il devenir une référence nationale et internationale ?
Au cœur du modèle porté par le Complexe Horticole d’Agadir (CHA) se trouve une conviction forte : la réussite de la transition agricole vers un modèle durable repose sur les compétences humaines. C’est pourquoi le projet intègre un programme ambitieux de formation, destiné à préparer une nouvelle génération d’ingénieurs, de techniciens et de cadres agricoles hautement qualifiés, capables de maîtriser les technologies de production les plus avancées.
Former une nouvelle génération d’ingénieurs et techniciens pour une agriculture de haute technologie


